enfumer

enfumer

enfumer [ ɑ̃fyme ] v. tr. <conjug. : 1>
• v. 1150; de en- et fumer
1Remplir ou environner de fumée. Poêle qui enfume une pièce. Tu nous enfumes, avec ton cigare ! P. p. adj. Atmosphère enfumée, par les fumeurs. « Les vapeurs nocturnes des bars enfumés » (Mac Orlan). Spécialt Enfumer une ruche, des abeilles (pour les neutraliser).
2Vieilli (à l'actif) Noircir de fumée, de suie. P. p. adj. Mur enfumé.

enfumer verbe transitif Remplir un lieu de fumée : Un poêle qui enfume la pièce. Environner quelqu'un de fumée : Va fumer dehors, tu nous enfumes. Déloger ou neutraliser un animal en l'incommodant par la fumée : Enfumer un renard dans son terrier.

enfumer
v. tr.
d1./d Remplir, envelopper de fumée.
|| Incommoder avec de la fumée. Il nous a enfumés avec ses cigares. Enfumer un terrier.
Enfumer des abeilles, les engourdir avec de la fumée (pour visiter la ruche).
d2./d Noircir de fumée.

⇒ENFUMER, verbe trans.
A.— Emplir de fumée, plonger dans la fumée.
1. [Le compl. d'obj. dir. désigne une chose] Pièce, cabane enfumée. Poêle qui enfume un appartement (ROB.). Shelley (...) s'en moquait bien, préférant mille fois l'air frais de la nuit à l'atmosphère enfumée d'une salle de jeu (MAUROIS, Ariel, 1923, p. 300).
2. P. ext. [Le compl. d'obj. dir. désigne une pers. ou un animal] Entourer de fumée quelqu'un de manière à l'incommoder. Enfumer qqn avec la fumée d'une cigarette, d'une pipe, en brûlant du bois vert. Le déjeuner a duré une heure (...) et vous nous avez ensuite permis de vous enfumer pendant une autre heure au salon (GYP, Cœur d'Ariane, 1895, p. 114).
Emploi pronom. à sens passif. [Le suj. désigne une pers.] S'entourer de fumée. Ouvrir une fenêtre pour ne pas s'enfumer. Le régiment s'enfuma d'une décharge à bout portant. Quelques chevaux tombèrent (ESPARBÈS, Vent du boulet, 1909, p. 48). C'est à la lumière au pétrole, qu'elle réparait notre ouvrière. Elle s'enfumait, elle se crevait les yeux avec ça (CÉLINE, Mort à crédit, 1936, p. 53).
Spéc. Projeter de la fumée dans un terrier pour en chasser son occupant, ou dans une ruche pour rendre les abeilles inoffensives. Enfumer un blaireau, un renard. Ce bourdonnement de ruche qu'on enfume (HUYSMANS, Oblat, t. 2, 1903, p. 88).
P. anal. [Le compl. d'obj. dir. désigne une pers.] Des gens qui s'étaient retirés dans une caverne pour célébrer le sabbat se laissèrent enfumer, plutôt que de faire un mouvement pour se défendre (RENAN, Hist. peuple Isr., t. 4, 1892, p. 315).
3. Au fig. [En parlant de l'ivresse ou de ce qui grise] Troubler l'esprit. L'absinthe bue un soir d'hiver Éclaire en vert l'âme enfumée (CROS, Coffret Santal, 1873, p. 28). Un cerveau enfumé d'opium (HUYSMANS, À rebours, 1884, p. 84).
P. métaph. Enfumer qqn d'encens. Griser par des compliments excessifs (cf. J. DE MAISTRE, Corresp., 1814, p. 125).
B.— [Le compl. d'obj. dir. désigne une chose] Noicir ou ternir sous l'action prolongée de la fumée (dans ce sens surtout attesté au part. passé passif). Une façade, un plafond enfumé(e); une lampe, un tableau enfumé(e). [Titien, Rembrandt] seraient bien douloureusement surpris en retrouvant des croûtes enfumées, au lieu de leurs ouvrages, comme il les ont faits (DELACROIX, Journal, 1854, p. 222) :
1. C'est là une vraie cuisine (...). Au plafond, un noir réseau de poutres magnifiquement enfumées, auxquelles pendent toutes sortes de choses joyeuses, des paniers, des lampes, un garde-manger, et au centre une large nasse à claire-voie où s'étalent de vastes trapèzes de lard.
HUGO, Le Rhin, 1842, p. 29.
Emploi pronom. à sens passif. [Le suj. désigne une chose] Devenir noir ou terne sous l'action prolongée de la fumée. Mes meubles se sont enfumés cet hiver (LITTRÉ) :
2. Quant au coloris [de la Vierge aux rochers de Vinci], si, en s'enfumant, il a perdu sa valeur propre, il a gardé une harmonie préférable pour les délicats, à la fraîcheur et à l'éclat des nuances.
GAUTIER, Guide de l'amateur au Musée du Louvre, 1872, p. 213.
P. anal., vx. Teinter artificiellement en utilisant de la fumée ou d'autres matières. Enfumer des verres (LITTRÉ). Enfumer des verres de lunettes (Ac. 1932).
Spéc., B.-A. Enfumer un tableau. Lui donner, par certains procédés, l'apparence d'une toile ancienne. Menghetti avait enfumé de bistre le tableau (BALZAC, Lettres à Madame Hanska, Paris, Éditions du Delta, 1846, p. 312).
Rem. La docum. atteste a) L'emploi adj. du part. passé au sens anal. de « qui a l'aspect terne, la couleur grise de la fumée ». Teint enfumé; paupières, yeux enfumé(e)s; ciel enfumé. La couleur un peu enfumée [des verres] est convenable au vin de Bordeaux (MÉRIMÉE, Lettres à F. Michel, 1870, p. 66). La femelle a les teintes plus enfumées, la poitrine et la gorge marquées de roussâtre (COUPIN, Animaux de nos pays, 1909, p. 142). On rencontre aussi un ex. d'emploi subst. Au musée de Cluny, en voyant ces bois, ces cuirs, tout ce noir, tout ce sombre, cet enfumé (GONCOURT, Journal, 1865, p. 139). b) Enfumure, subst. fém. Ce qui recouvre un tableau qui a été enfumé (supra B spéc. B.-A.). En ôtant l'enfumure de Menghetti, nous avons trouvé la crasse des cierges et de l'Église, et, en l'enlevant, il a reparu le chef-d'œuvre le plus extraordinaire, une peinture fraîche comme si c'était peint d'hier (BALZAC, Lettres Étr., t. 3, 1850, p. 324).
Prononc. et Orth. [], (j')enfume []. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. 1150 enfumé « noirci, sali [comme par la fumée] » (Charroi de Nîmes, éd. Duncan McMillan, 990); ca 1180 enfumer (HUON DE ROTELANDE, Ipomedon, 9584 ds GDF. Compl.). Dér. de fumer; préf. en-. Fréq. abs. littér. : 26 (enfumé : 196).
DÉR. Enfumage, subst. masc. a) Action d'enfumer (supra A 2 spéc.). Enfumage des abeilles (ROB.). L'enfumage des nuisibles est remplacé par l'emploi, peu sportif, des gaz asphyxiants (DUCHARTRE 1973). b) Procédé de conservation de certains aliments. La conserverie domestique (...) présente une grande variété de procédés : séchage au soleil ou par la chaleur artificielle, salage, boucanage, enfumage (Industr. conserves, 1950, p. 3). []. 1res attest. 1846 « défaut provoqué par la fumée, pendant la cuisson de la porcelaine » (BESCH.), 1876 « action d'enfumer [contre le phylloxera] » (BARRAL, L'Opin. nationale, 29 Mars, feuilleton 1re p. 5e col. ds LITTRÉ); du rad. de enfumer, suff. -age.
BBG. — DARM. 1877, p. 83 (s.v. enfumage). — GOHIN 1903, p. 376 (s.v. enfumé). — KELLER (H.-E.). Notes d'étymol. gallo-romane et romane. In : [Mél. Wartburg (W. von)]. Tübingen, 1968, p. 245.

enfumer [ɑ̃fyme] v. tr.
ÉTYM. V. 1150; de en-, et fumer.
1 Emplir, ou environner de fumée. || Poêle qui enfume un appartement.
2 (1636). Incommoder par la fumée. || Enfumer qqn avec la fumée d'une pipe. || Ce bois vert nous enfumait.Spécialt. || Enfumer un renard dans son terrier, pour l'en faire sortir. || Enfumer des abeilles dans leur ruche, pour les neutraliser ( Enfumoir).
1 (…) le prince tout à l'heure
Veut qu'on aille enfumer renard dans sa demeure (…)
La Fontaine, Fables, VIII, 3.
3 (1674). Fig. et vx. Troubler l'esprit de (qqn), par des vapeurs d'alcool, des bouffées d'orgueil, etc.
2 Mais pour un vain bonheur qui vous a fait rimer,
Gardez qu'un sot orgueil ne vous vienne enfumer.
Boileau, l'Art poétique, II.
4 (Vieilli à l'actif). Noircir ou ternir par la fumée. || Enfumer des verres de lunettes.Spécialt. Peint. || Enfumer un tableau, lui donner par certains procédés l'apparence d'une vieille toile.
Par ext. Noircir de fumée, de suie.
——————
s'enfumer v. pron.
S'entourer de fumée. || S'enfumer près d'un feu de bois vert.
3 Les Lapons n'ont point d'autre remède contre ces maudits animaux (moucherons) que d'emplir de fumée le lieu où ils demeurent (…) nous fîmes la même chose et nous nous enfumâmes (…)
J.-F. Regnard, Voyage en Laponie, t. IV, p. 206.
Fig. || La vallée s'enfume de brouillard (cit. 7).
——————
enfumé, ée p. p. adj.
1 Salles basses et enfumées (→ Bistrot, cit. 3; dancing, cit. 1). || Chaumine (cit. 1) enfumée. || Gare enfumée.Chapelle (cit. 2) enfumée d'encens.
4 (…) la petite gare enfumée d'où l'on partait pour Saint-Maur. Il n'y avait plus qu'un seul train, vers une heure et demie. J'étais crotté jusqu'à l'âme, sale, farouche, irrité.
G. Duhamel, Chronique des Pasquier, III, V, p. 62.
2 Vx. || Verres enfumés. Fumé; noir.
Mur enfumé, couvert de suie.Fig. || Teint enfumé, gris, terne, couleur de fumée.
DÉR. Enfumage, enfumoir.

Encyclopédie Universelle. 2012.

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